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Le bataillon San Patricio dans la guerre du Mexique

Publié le par Olivier Millet

Le bataillon San Patricio dans la guerre du Mexique

Le bataillon San Patricio ou Saint-Patrick fut une unité combattant pour le Mexique mais composée entièrement de soldats non mexicains, principalement des déserteurs irlandais de l'US Army d'où le nom du bataillon. Considérés comme des traitres par les Américains, ils étaient au contraire considérés comme des héros par les Mexicains (tout est question de point de vue)


Le Mexique, catholique, proposa aux émigrés américains de confession catholique de rejoindre leurs rangs et leur cause. Les émigrés en provenance d'Irlande, catholiques, qui arrivaient aux États-Unis et qui s'engageaient dans l'US army, étaient souvent victimes de mesures discriminatoires voire de traitements vexatoires de la part de leur encadrement protestant. D'ailleurs aux États-Unis en général, les Irlandais, très nombreux, durent faire face à de tels comportements partout.

De son côté, la propagande mexicaine n’hésita pas à parler de tentative de détruire le catholicisme mexicain de la part des États-Unis afin de cimenter dans la défense de leur foi tous les gens de bonne volonté du Mexique ... ou d'ailleurs. Une certaine portion des déserteurs de l'armée américaine avaient effectivement rejoint les Mexicains pour fuir leurs conditions de vie médiocre au sein de l'US Army à cause de leur foi catholique mal perçue dans un pays à majorité protestante. La désertion était d’ailleurs un problème récurrent dans l'armée américaine. On estime à 14%, soit 2800 hommes, le nombre de déserteurs de l'US army durant toute la guerre.

Les déserteurs américains catholiques irlandais mais aussi ceux provenant d'ailleurs furent amalgamés dans un régiment : le régiment de Saint Patrick, en référence à son chef John Riley, irlandais de souche, ancien soldat de l'armée anglaise qui a déserté l'US army en avril 1846 soit un mois avant la guerre (cette petite différence lui sauvera la vie).


Le premier bataillon vit le combat à Monterrey contre les forces du général Taylor. Engagés en tant qu'unité d'artillerie ils formèrent une batterie sous les ordres de Riley et combattirent farouchement. Ils brisèrent, dit-on, deux assauts américains avant que la bataille ne s'achève sur une défaite mexicaine.

La batterie ayant montré de grandes qualités à Monterrey, ils furent versés dans l'infanterie et formèrent un bataillon à pied d'un effectif avoisinant les 800 hommes (effectif variable selon les sources). Le bataillon combattit à Cerro Gordo où l'armée mexicaine habilement tournée par Scott ne résista pas longtemps et s'enfuit, sauf les San Patricio qui connaissaient leur sort en cas de capture. Ils combattirent jusqu’à être tués ou capturés.

Ils étaient considérés comme des déserteurs et des traîtres par les Américains ; le destin attendu par tout homme du bataillon qui tomberait entre les mains des Américains au combat serait la corde.

Deux bataillons furent organisés en 1847 par Santa Anna, ces deux unités regroupaient 100 hommes chacune. L'unité fut transférée dans le secteur de Mexico à Churubusco. Une compagnie fut affectée à la défense d'un pont, renforcée par une batterie de 5 canons. Les Irlandais combattirent jusqu’à ce que les forces américaines les obligent à se replier en arrière vers un couvent. Les troupes mexicaines qui combattaient avec le bataillon San Patricio, à court de munitions, souhaitaient se rendre, mais les Irlandais, conscients de leur sort en cas de capture, abattirent le drapeau blanc ( ou son porteur ) chaque fois qu'il était hissé par leurs camarades mexicains. Complètement submergés par les Américains, les survivants de la compagnie furent capturés après un combat épique.

72 soldats furent envoyés en cour martiale le 23 août 1847 et condamnés à mort à l'exception de deux d'entre eux pour un motif de procédure et l'autre pour son état de santé mentale. La population de Mexico et des politiques locaux tentèrent de négocier pour sauver ces hommes de la mort et Scott réévalua la sentence de mort. Finalement 30 hommes furent effectivement exécutés. Leur chef, John Riley, ayant rejoint le régiment avant la guerre ne pouvait être pendu pour haute trahison ; il fut fouetté et marqué au fer rouge de la "D".

Cet épisode ne fut pas la fin des San Patricio car Mexico continua sa politique d’accueil des déserteurs et leur intégration dans l'armée mexicaine. Deux compagnies supplémentaires furent levées en 1848 et participèrent à des opérations de surveillance ou de lutte contre la guérilla indienne. Ils furent même impliqués lors des troubles qui éclatèrent à Mexico après la capitulation avant d'être dissous et la plupart de ses membres s'établirent au Mexique, ne pouvant revenir aux États-Unis ou dans leur patrie d'origine.

L'uniforme du régiment semble avoir été la tenue donnée aux gardes nationaux : une veste bleu turquin avec des revers de poitrine rouges ou bleus, le col et les manches rouges passepoilés de jaune. Certaines sources indiquent une tenue entièrement bleue avec liserés rouges comme l'artillerie puisqu'il s'agissait de leur première affectation. D'autres encore une tenue grise. Dans un Mexique désorganisé, le bataillon a certainement dû porter différentes tenues plus ou moins réglementaires en fonction de ce qu'il trouvait.

Le pantalon bleu clair était équipé d'une bande rouge sur le côté. Le shako pouvait être le modèle tronconique. Le drapeau de l'unité pourrait être de couleur verte avec une harpe ailée entourée de "shamrock" et la devise "Erin Go Bragh" "Irlande pour toujours" sur une face et un Saint Patrick avec la devise San Patricio sur l'autre ; le drapeau figuré sur la planche est hypothétique.

L’Amérique n'avait pourtant pas fini d'entendre parler des combattants irlandais. L'un des derniers et plus poignants exemples du courage de ces hommes, exilés loin de leur patrie, aura lieu dans un champ près de Fredericksburg, un certain 13 décembre 1862. Deux brigades irlandaises, l'une habillée en bleu et l'autre habillée en gris, se fusillèrent en agitant leurs drapeaux verts frappés de la harpe gaélique.

Au Mexique, encore aujourd'hui, le bataillon des San Patricio est considéré comme une unité de héros commémorée tous les ans au 12 septembre (date des exécutions des prisonniers irlandais) et le jour de la Saint Patrick.

cette oeuvre de Don Troiani montre l'attaque de Churubusco où s'illustrèrent les hommes du bataillon San Patricio (au premier plan), les hommes portent la tenue bleue de la garde nationale avec le pantalon bleu clair à bande rouge

cette oeuvre de Don Troiani montre l'attaque de Churubusco où s'illustrèrent les hommes du bataillon San Patricio (au premier plan), les hommes portent la tenue bleue de la garde nationale avec le pantalon bleu clair à bande rouge

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